Jean Ray (1887-1964)
Voici Jean Ray, un homme extraordinaire à l'imagination aux facettes multiples, à l'intelligence particulière et à l'écriture audacieuse. Je l'ai connu grâce à ma participation à un congrès
portant sur la littérature de l'imaginaire. Dernièrement, j'ai terminé de lire « Les 25 meilleures histoires noires et fantastiques de Jean Ray » dans la Collection
Marabout Géant G 114. Sur le net, il foisonne de sites très intéressants sur cet écrivain de génie, ainsi mon petit article n'est pas l'équivalent de ce que l'on retrouve déjà. Mais bon, je
me retrousse les manches et je vais essayer de mener mon devoir à bien. Je vais commencer avec une citation de Henri Vernes, l'un de ses amis, qui décrit ainsi ce qu'est de lire du Jean Ray :
« Lire Jean Ray, c'est se lancer à corps perdu dans une redoutable aventure, pleine de surprises et d'épouvantements, et dont on n'est jamais
sûr de revenir. »
Ce qui m'a surprise des nouvelles de l'oeuvre Les 25 meilleures histoires noires et fantastiques, c'est que d'un certain point, elles se ressemblent toutes; l'homme entre deux âges en
est toujours le principal héros (notez qu'il doit y avoir des exceptions). Ce dernier est habituellement porté sur le whisky (La nuit de Camberwell) et est aussi fréquemment tourmenté, solitaire
(pas de femmes, pas d'enfants, pas d'amis ou presque).
« Alerton Blass était un homme aimant la solitude et dont les idées tournaient en rond comme ses bêtes de bois. »
[Merry-go-Round]
Les histoires se déroulent dans un atmosphère Dark, gothique, sombre, lugubre, mystérieuse... souvent dans une bourgade de l'Angleterre ou de la France... ou bien sur un bateau voguant sur
l'océan (Le Psautier de Mayence). Vestiges des souvenirs de Ray, qui a été marin pendant quelques années.
Le fantastique est quant à lui partout : dans une assiette, une chambre noire, une ruelle, un miroir, un héritage, une main de fer... Dans les histoires de Ray les fantômes rôdent où ils le
souhaitent, les âmes sont avides de vengeance (Le cousin Passeroux) et les objets sont animés de forces obscures (Le miroir noir). La mort également s'offre aux visages des humains contorsionnés
par la peur, car il faut le dire la peur est bien un thème récurrent dans les histoires de Ray. Rarement nous en lisons une, sans ne rien ressentir à la fin... Un frisson parcoure notre échine,
voilà l'effet Ray!
Dans ses nouvelles, les héros n'ont pas de morale, ils volent les dents en or des défunts, pillent les romans et s'en approprient les idées, profitent de la naïveté des femmes esseulées. Parfois,
un vampire se pointe à l'horizon, une pieuvre venue d'une autre dimension déguste un whisky calmement, et d'autres fois encore un homme bien se transforme en meurtrier.
D'autres fois la mort se matérialise, on succombe à la peur, on ne veut pas qu'elle existe. Et pourtant Ray tient à nous dévoiler le contraire....
«Or, à côté de ses pas à lui, bien imprimés dans la pâte fidèle de la neige, M.Buttercup venait de voir deux empreintes épouvantables,
invraisemblablement hideuses, grandes, qui, elles aussi, atteignaient l'extrême bord de la plate-forme, mais ne revenaient pas en arrière, comme si la chose qui marchait dans la nuit avait prit
là son essor monstrueux...» [Le dernier voyageur]
J'espère que vous avez apprécié ce petit voyage dans les profondeurs de l'imaginaire ténébreux de Ray, un lieu certes peuplé de fines angoisses, mais aussi de splendides métaphores, de
descriptions talentueuses et de pensées philosophiques sur la vie et ses déboires.
Liens:
Jean Ray
sur Noosfere
Jean Ray
sur Wikipédia
La gardien du cimetière (la nouvelle en intégrale sur wikisource)